Nous sommes vers la fin du 19ième siècle et il semblerait que la première course automobile a eu lieu lorsque la deuxième voiture a été construite.
Chicago 1895
Il appert que la première véritable course automobile ait été organisée par le Chicago Times-Herald et elle était prévue pour le 2 novembre 1895. Cependant, dû à de mauvaises conditions climatiques et n’ayant que 2 participants, la course a été reportée au 28 novembre.
Cette fois-ci, le parcours a été rétréci à 87 km et il s’agissait d’effectuer un aller/retour entre les villes de Chicago et Evanston. Six (6) voitures y participent et il aura fallu 10 heures pour que la voiture gagnante rallie le fil d’arrivée soit, à la vitesse moyenne de 8,4 km/h.
Les « board tracks » et leur raison d’être
Tout d’abord il est important de spécifier que les routes avec une surface en bitume (asphalte) étaient quasi inexistantes au début du 20ième siècle en Amérique. La première route à être goudronnée est l’historique route #66 en 1937 et sur une distance de 3670 km. Cette route mythique que l’on surnommait « Main Street USA » traversait huit (8) états sur trois (3) fuseaux horaires et s’échelonnait de Chicago à Santa Monica en Californie. Alors quoi d’autre que le bois pour suppléer aux pistes de terre battue, voici donc la raison d’être des pistes en bois : The board track.
Les « board tracks » et leur construction
L’Indianapolis Motor Speedway érigé en 1909, est la première piste construite pour la course automobile et demeure à ce jour le site de l’événement motorisé le plus prestigieux au monde soit l’Indianapolis 500, mais au début du siècle dernier, il y a une période où sa popularité est surpassée par un phénomène appelé les courses de « board track ». Il s’agissait de pistes ovales construites en bois d’une longueur moyenne de 1.25 mille dont certaines étaient même de 2 ½ miles. Au travers de tous les États-Unis, un total de 24 pistes ont été construites au cours d’une période s’échelonnant sur 2 décennies soit de 1910 à 1931.
À titre d’exemple, prenons celle du Speedway Park de Chicago construite en 1915. Cette « mammouth » piste en bois ovale de 2 miles a été construite sur un terrain d’une superficie de 320 acres. La surface de course était de 60 pieds de large sur le droit avant, 70 pieds dans les courbes (ces dernières comportant une inclinaison de 19 degrés) et 50 pieds de largeur sur le droit arrière. En matériel, elle a nécessité 14 millions de pieds de bois (la surface étant composée de 2×4 sur le travers), 500 tonnes de clous et 15,000 pieux en ciment (50,000 verges cubes de béton). Pourvue d’une main d’œuvre abondante, sa construction n’a pris que 60 jours. Dario Resta a été le vainqueur de la première course de 500 milles présentée le 19 juin 1915. Avec des vitesses de pointe au-delà de 100 mph et une moyenne de 97.58 mph, elle a été 8 miles à l’heure supérieure au meilleur temps des 500 miles d’Indianapolis. Dario Resta remportait une bourse de 23 000$, une somme colossale pour l’époque.
Thrills & Funerals (Speed Sport)
Leur forte inclinaison pouvant atteindre 60 degrés (spécialement celles destinées aux courses de motocyclettes), rendait possible des vitesses fulgurantes et de ce fait… meurtrières. Il était fréquent que les bolides de course, tant motos qu’automobiles, soient catapultés chez les spectateurs, soit par une banale perte de contrôle que par une force centrifuge trop grande, résultant en une accélération latérale à laquelle le véhicule ne pouvait résister. Ici à titre d’exemple, il est important de mentionner qu’au début des années 1900, les courses de motos avaient la cote. Un état de chose à mentionner : ces motos capables de vitesse excédant 100mph (160kmh), n’avaient ni frein, ni transmission ni embrayage pour se ralentir. Elles reposaient uniquement sur la compression du moteur pour s’arrêter.
À titre d’exemple, le 30 juillet 1913, lors d’une course de motos sur le « board track » du Lagoon Motordrome de Ludlow KY, le pilote Odin Johnson perd le contrôle, frappe un poteau et se retrouve dans la foule avec sa moto en flamme dont le réservoir d’essence avait explosé. Résultat : 8 morts (incluant lui) et 35 blessés dont la moitié entre la vie et la mort. Cet incident faisait suite à une autre tragédie survenue quelques mois plus tôt sur le « board track » du Vailburg Motordrome de Newark NJ, causant la mort d’également 8 personnes dont Eddie Hacha champion mondial en titre de motocyclette.
Ces pistes appelées Motordrome avaient maintenant la qualification de Murderdrome. Mais même malgré ce fait, la popularité des courses de « board track » étaient telles, qu’il n’était pas rare que les assistances soient supérieures à celles des 500 miles d’Indianapolis. Entre autre, la première course présentée au Speedway Park de Chicago a attiré une foule estimée à 80 000 personnes, mais selon le journal de l’époque Speed Sport il y avait une raison pour cette popularité… Le danger procurant un certain « trills » tant pour les pilotes de motos ou de voitures de course que pour les spectateurs, dont tout se terminait souvent en funérailles. En plus des pilotes, nombre de spectateurs y ont perdu la vie. Les bourses étaient telles, que l’engouement de plusieurs valeureux pilotes étaient prêt à en prendre le risque pour faire fortune.
La fin d’une époque
Détériorées par les accidents résultant souvent en incendie ou encore par les intempéries, ces pistes de course en bois appelées « board track » avaient une durée de vie moyenne de 3 ans.
Au début des années 1920, les courses de motos sont bannies des « board tracks » et leur terrain d’activité ont été par la suite principalement concentré sur les pistes de type « flat track » en terre battue. Quant aux courses d’automobiles sur ces pistes en bois, elles persistent pour une autre décennie, malgré le décès de plusieurs d’entre eux. Ces véhicules étaient de véritable missile et offraient peu de sécurité. Sans arceau ni ceinture de sécurité, montés sur des pneus à peine plus gros que ceux d’une motocyclette, ils étaient capable de vitesse avoisinant les 150 mph (250km/h). En fait, il n’était pas rare que le champion d’une saison ne survivait à défendre son titre l’année suivante. La perte de pilotes, la difficulté de se procurer une couverture d’assurance adéquate et le début de la grande dépression des années 30, sonnent le glas de cette forme de compétition motorisée.
Conclusion
Avec le recul et ne serait-ce que du point de vue « thrills & funerals », on peut penser que les « board tracks » n’avaient rien à envier aux colisées romains. Sans aucun doute que ces facteurs ont mis un terme à l’époque la plus sanglante que le monde de la course automobile ait connu en Amérique.
En terminant, j’aimerais vous montrer un vidéo d’archive tiré du site web de l’Université South Carolina sur ces courses de « board track » courues au début du siècle.
Lors de notre prochaine chronique, on verra l’évolution de la communication et son importance dans le monde des courses automobile.